L’idée est faussement simple : choisir sept photos importantes de son parcours artistique et les commenter.
Rares sont ceux qui ne prennent pas de clichés de leurs œuvres terminées. Une façon de garder en mémoire un moment, une action que la rue efface inévitablement. L’Atlas, Jules Dedet, parisien né à Toulouse en 1978, immortalise toujours son travail, un mélange de calligraphie, d’art optique très identifiable. Ses interventions urbaines sont travaillées, pensées. L’homme expose dans le monde entier, mariant spontanément les interventions en galeries, musées ou dans la rue. Retour sur soi en sept images, un chiffre déjà expérimenté en 2002 avec « Toiles Errantes » (2002-2012). Ce projet consistait à prendre en photo ses sept premières toiles, les déposer dans le monde et les immortaliser par un cliché. Mais ici, l’exercice est plus introspectif.
Première invitation internationale – Jogjakarta, Indonésie 2005
J’ai pris cette photo en 2005 à Jogjakarta, sur l’île de Java (Indonésie).
C’était une des premières fois où l’on m’invitait aussi loin pour réaliser un mur.
Il était collé à une mosquée. Ce moment m’a marqué car juste après la prise du cliché, il y a eu l’appel à la prière. Nous étions une dizaine de personnes à contempler l’oeuvre en silence.
J’ai réalisé la chance que j’avais de pouvoir voyager pour faire ce que j’aimais même si cela ne me rapportait pas d’argent. Je suis devenu conscient de vivre mon rêve: voyager dans le monde grâce à mon art.
Le lendemain, j’ai écrit une phrase sur le mur : « Les actions, pèsent plus lourd que les mots.»
Première affiche officielle et première exposition – Le Mur, Paris 2007
Cette photo symbolise un moment clé de l’histoire des années 2000.
C’est la première affiche du MUR collée de manière officielle. (NDLR : le MUR est une association fondée en 2003, permettant aux artistes de s’exprimer sur la facade du 107 rue Oberkampf, Paris 11. Elle change toutes les deux semaines)
Pendant plusieurs années, tous les vendredis soir avec le peintre et sculpteur français Jean Faucheur, nous repassions systématiquement les publicités exposées sur le mur. Jusqu’à ce que la mairie du 11 ème nous offre le lieu.
Ce cliché marque aussi l’année où j’ai élaboré ma première exposition à la Galerie parisienne LJ Beaubourg. C’était le début de la reconnaissance du street art, et de la mienne en même temps.
L’année de mes 30 ans – Beaubourg, Paris 2008
Sarah Mattera, chef de projet au Service de l’Action Educative et de la Programmation publics jeunes du Centre Pompidou, me propose de réaliser une performance participative pour la galerie des enfants du Centre Pompidou.
Il s’agit de ma première réalisation monumentale au sol, j’allais avoir 30 ans, et cela faisait 7 ans que j’ornais le bitume de Paris avec mes boussoles au gaffer. Cette œuvre gigantesque est venue clore ce cycle.
J’avais déjà exposé au Centre Pompidou en 2004 pour l’événement collectif « L’invention du monde ». Il s’agissait alors de travailler autour de la carte géographique. Une de mes boussoles en gaffer était déjà venue décorer le sol mais elle était beaucoup plus petite.
La Mairie de Paris doit faire appel à moi pour réaliser une signalétique urbaine destinée aux piétons. Une boussole orientée serait apposée à la sortie de chaque métro parisien… j’attends toujours, l’espoir fait vivre!
Nouvelle technique et paternité – Rome, 2010

La photo date de 2010 et a été prise par la mère de ma deuxième fille. Nous sommes à Rome dans un quartier nommé Garbatella où prenait place un festival organisé par le parisien romain Christian Omodeo, fondateur du site internet Le grand Jeu.
Pour la première fois, je ne réalisais pas une affiche originale, c’est-à-dire peinte à la main. Je voulais utiliser un autre procédé, celui inventé par l’artiste cannois Jérôme Demuth : imprimer à l’aide d’une tireuse de plan d’architecture, de longues haies de 90 cm de large. Une technique réutilisée massivement par le parisien JR.
Ce cliché marque aussi de manière plus personnelle une nouvelle période de ma vie sous l’étoile de la paternité.
Déménagement – VAO Studio, Seine-Saint-Denis, 2015.

La photo marque mon départ de la forge de Belleville (Paris 20) et mon arrivée aux Lilas (Seine-Saint Denis, 93) dans l’immeuble où JonOne, Psyckoze, Speedy Graphito avaient déjà leurs ateliers depuis quelques années.
Le cliché représente aussi mon alliance artistique et amicale avec le parisien graffeur et compositeur de musique Tanc. Et puis ce désir de continuer la peinture quotidiennement, dans mon atelier, « le VAO studio », que je considère comme une oeuvre à part entière.
Le lieu a été dessiné par l’architecte Phillipe Rizotti. Ici tous les murs et modules sont sur roulettes et peuvent s’ouvrir pour ranger les outils ou les oeuvres.
L’idée était de faire disparaître le travail architecturale dans l’espace existant.
Rêve d’immortalité – Paris, 2015.

Je souhaite que mes créations fassent parties de la ville, ou plutôt que mon oeuvre et la ville ne forment qu’un. Qu’elles ne puissent plus se séparer même après ma mort.
Ce vieux rêve propre à chaque artiste, devenir « immortel », a pu être réalisé grâce à Elise Herszkowicz, une amie d’enfance. Par l’intermédiaire de son association Art Azoï, Elise a réussi à trouver les fonds et les autorisations nécessaires pour orner avec du carrelage cette crèche, située au coin de la rue des Pyrénées et de la rue de Bagnolet. Mon ami Frederic Spillbaueur m’a aidé à poser ce carrelage.
Cette création a été pour moi un lâcher prise, une première oeuvre que je ne réalisais pas moi-même, que j’avais uniquement dessinée, comme l‘aurait fait un architecte.
Un mur difficile à apprivoiser – Cascades, Paris 2016.
J’ai réalisé cette photo avec mon Leica argentique. Il s’agit de ma dernière réalisation murale, j’en suis particulièrement fier! (Sourire)
Réaliser cette fresque a été une vraie performance car les problèmes techniques se sont enchaînés : la pluie, le froid, le vent de novembre, la nacelle qui ne marchait qu’un jour sur deux, les 40 mètres de haut de l’immeuble… Sans parler du gaffer qui ne collait pas au nouveau crépi réalisé par l’association Emmaüs. Il a fallu l’agrafer au mur. Bref, il a fallu huit jours entiers pour achever ce mur, dans des conditions extrêmes.
CASCADES x L’Atlas x Emmaüs x Art Azoï from L’ATLAS on Vimeo.
Je voulais que l’on puisse voir de loin une forme géométrique se suffisant à elle-même. De près, l’idée était de provoquer une sorte de trompe-l’oeil afin que l’on ne sache plus de quel côté ‘tombe’ la cascades de lignes.
Evidemment il fallait que l’on puisse toujours lire mon nom de tagger, c’est sur ce mur que j’ai fait mon premier tag à Paris en 1991 !
Exposition Dissolutions
Solo Show L’Atlas
Jusqu’au 24 juin 2017
Speerstra Gallery
1 Chemin des Cerisiers
1183 BURSINS
Switzerland
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