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Qui est vraiment Bjørn Van Poucke, fondateur du festival belge The Crystal Ship ?

C'est au tour de Bjørn Van Poucke de se prêter au jeu de La Grande Interview.

C’est au tour de Bjørn Van Poucke de se prêter au jeu de La Grande Interview. Des questions pour en savoir un peu plus sur sa personnalité, ses goûts et ses projets. Une interview sérieuse mais pas trop.

Phlegm

Gantois d’origine, Bjørn Van Poucke est l’auteur du livre Street Art / Today publié aux éditions Alternative en octobre 2016. Il est également curateur du festival The Crystal Ship, crée en 2016 à Ostende. Sous son invitation, Roa, Guido Van Helten, Robert Montgomery, Ella & Pitr, Cyrcle, Jaune, Eversiempre etc… sont venus habiller les murs de cette ville portuaire de la côte belge. Bjørn est aussi fondateur de Street Art Belgium, une association aux multiples facettes.

L’homme ne se livre pas facilement, certaines de nos questions lui sont impudiques, il hésite à répondre. Une attitude réservée, appréciable.

1.Peux-tu te présenter ?

Je m’appelle Bjørn, j’ai 36 ans et j’ai toujours été amateur d’art, aussi loin que je puisse me souvenir. Je suis conservateur d’expositions, de festivals d’art et je travaille de près avec des artistes nationaux et internationaux. Je me suis spécialisé dans l’espace public et je produis plus de 25 installations, sculptures, interventions et fresques par an. The Crystal Ship est probablement mon projet le plus connu, un festival d’art ouvert à tous, situé dans la ville d’Ostende en Belgique. L’année dernière, il a accueilli plus de 70 000 visiteurs.

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Guido Van Helten (AUS) ©Streep

2.L’art urbain s’est finalement rapidement imposé dans ta vie professionnelle ?

J’organise des événements depuis l’âge de 17 ans. J’ai toujours essayé de combiner ces projets artistiques avec un autre métier. Dès que j’avais fini ma journée de travail je rentrais à la maison et je continuais à travailler sur mes projets jusqu’au moment de me coucher. Je travaillais plus de 100 heures par semaine ! Évidemment c’était un rythme intenable. Finalement j’ai fait deux burn out en 6 mois et mon médecin m’a conseillé de prendre une année sabbatique afin de repenser ma carrière.

C’est à partir de ce moment que j’ai décidé de travailler sur des projets culturels à plein temps, une décision risquée qui a grandement impacté ma vie. Depuis 5 ans, je travaille dans les arts et la culture. Mon seul regret, pour être honnête, est de ne pas avoir fait ce choix plus tôt.

Je pense que dans la vie il est important de suivre sa passion. Si vous devez vous traîner au travail tous les jours c’est que vous avez raté quelque chose.

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Bosoletti (AR) ©Streep

3.Comment est arrivée cette idée de festival à Ostende ? Une troisième édition est prévue ?

J’ai organisé mon tout premier festival d’art urbain en 2010. Quand j’y repense, je dois avouer que tout était très déstructuré et franchement rock’n’roll. L’engrenage a commencé comme ça et depuis nous essayons d’organiser une nouvelle édition du festival dans une ville différente chaque année. Nous avons évolué, nous sommes désormais plus professionnel. Il y a trois ans, nous avons reçu une invitation de la ville d’Ostende. Nous avons travaillé dur sur le concept et renommé le festival The Crystal Ship. Il n’est plus seulement focalisé sur de l’art urbain, cassant les frontières entre l’art public contemporain et une série de projets socioculturels. Avec cette approche, nous avons réussi à attirer plus de 70 000 visiteurs par an !

C’est aussi une façon d’engager les villes et ses résidents. The Crystal Ship  n’est pas seulement notre organisation, c’est aussi celle des habitants d’Ostende et de ses visiteurs. Nous sommes en train de travailler sur la troisième édition qui aura lieu en avril 2018. Toutes les œuvres d’art restent accessibles de façon permanente, il ne faut pas hésitez à s’y promener.  (http://thecrystalship.org).

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Johan Vande Lanotte maire d’Ostende

&

Bjørn Van Poucke

©Arne Deboosere

4.Pourquoi ce titre The Crystal Ship ? Fan de The Doors ?

Oui ! Un bateau fait de cristal flottant dans les airs, allant de ville en ville avec à son bord tout un groupe de créatifs capable de produire de superbes œuvres d’art. Comment ne pas aimer ?

5.Peux–tu expliquer ce qu’est Street Art Belgium ?

Street Art Belgium est une communauté en ligne centrée sur la promotion de l’art urbain en Belgique et orchestrée par l’équipe The Crystal Ship.

6.Te rappelles-tu d’un moment particulièrement compliqué à gérer ? (où tu as bien cru ne pas y arriver)

Sans aller trop dans le détail, j’ai eu des expériences très traumatisantes et difficiles quand j’étais jeune. Ces problèmes intenses sont comme des démons qui hantent mon esprit. Des fois ils reviennent, juste pour me rappeler ce par quoi je suis passé. Il m’arrive d’utiliser ces sentiments comme source d’inspiration. Pour moi l’art est une thérapie.

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1010 (DE) ©Streep

7.Te rappelles-tu d’un moment particulièrement émouvant, marquant ?

L’année dernière à Ostende, j’ai vu un couple de personnes âgées devant la fresque immense de l’artiste australien Fintan Magee. Ils se tenaient devant, je les ai observés aussi longtemps que j’ai pu. Ils ont parlé de l’œuvre pendant une quinzaine de minutes, pointant régulièrement la fresque du doigt. Nous essayons d’ouvrir les gens à l’art. Je me suis sentis très ému et reconnaissant de voir ces deux personnes qui n’avaient probablement pas un intérêt particulier pour l’art en général, discuter de notre pièce. Mission accomplie, me suis-je dit.

8.Que t’apporte personnellement l’écriture d’ouvrages ? Une façon d’aller dans le détail ?

Les opinions sur l’art de rue contemporain sont larges et variées, comme l’est la définition de cet art elle-même. C’est un art souvent mal compris, et l’information sur le fond historique est souvent perçue de façon étriquée, avec la croyance populaire que cela est sorti de nulle part autour des années 1960, vous pouvez demander à Wikipédia ! En réalité, l’art visuel dans les lieux publics possède l’une des histoires la plus longue et la plus répandue de toutes les formes de création. Nous voulions montrer un fragment de ces pratiques contemporaines. Notre livre Street Art/ Today  se porte très bien et il existe aussi une traduction en français. (NDLR : Street art / Today a été écrit en collaboration avec Elise Luong.)

9.Penses-tu que les artistes doivent toujours être rémunérés  ?

En tant qu’organisateur, je paie tous les artistes participants. Je pense qu’il est très important que leur travail soit rémunéré, afin qu’ils puissent continuer d’exercer au mieux.

Il est temps pour notre société de comprendre ce que représente l’art et de montrer davantage de respect envers les procédés artistiques. Nous sommes très forts pour dépenser de l’argent dans des produits manufacturés. Mais quand vient le moment de dépenser pour l’art, il semblerait qu’il y ait une supposition commune visant à penser que les artistes devraient travailler gratuitement.

L’art et la culture mettent en lumière ce que nous sommes, ils nous apprennent la compassion et la tolérance. Une vie sans art n’est pas une vie.

10.Ta dernière grande déception ?

Ma vie amoureuse

11.Ta dernière grande satisfaction ?

Ma vie amoureuse

12.La dernière actualité choquante ?

Je me sens toujours très affecté par la mort ou les blessures d’innocents. Qu’ils soient à Mossoul combattant l’ISIS ou comme ces milliers de réfugiés serrés sur des bateaux minuscules à la recherche d’une vie meilleure, ou encore ces asiatiques en train de mourir à cause des inondations…

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Alexis Diaz (PR) ©Streep

13.Quelque chose que tu trouves aberrant ?

Le climat change rapidement, il est maintenant temps d’agir. Les politiciens doutent encore des arguments scientifiques et ont du mal à prendre des décisions appropriées. Pourtant, ils sont les seuls à pouvoir avoir un impact majeur sur tout cela.

14.Une personnalité que tu adores ?

Je suis rarement en admiration totale devant une personnalité, mais j’adorerais partager une tasse de thé avec l’artiste américaine Jenny Holzer. J’aime sa façon de parler des problèmes politiques et sociaux (la violence, la sexualité, la guerre, la mort). Elle est simple, directe, très poétique dans un sens. (NDLR L’artiste Jenny Holzer est née aux États-Unis en 1950. Elle travaille souvent avec les enseignes lumineuses, les rubans à cristaux liquides. Elle diffuse ses messages, ses écritures, par projection. Il faut que l’art soit vu, il doit selon elle, être ouvert à tous. )

15.Une célébrité décédée que tu aurais aimé rencontrer ?

Kurt Cobain. Dans les années 90 j’étais cet enfant inadapté, fruit d’un foyer brisé, fumant des cigarettes dans le dos de mes parents et n’ayant pas un sou pour de jolis vêtements. J’étais cet enfant bizarre qui ne sait pas comment se conformer à la société, et je me sentais heureux d’avoir Nirvana à mes côtés.

16.Ta chanson du moment ?

J’ai récemment découvert sur Spotify une playlist alternative des années 90, pleine de pop Britannique, de trip hop et de grunge. Toutes ces chansons me ramènent à ces moments difficiles mais familiers auxquels j’aime repenser.

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Faith47 (SA) ©Streep

17.Tes prochains projets ?

En dehors de projets de fresques de grande ampleur, il y a aussi deux expositions et un plus petit festival d’art que je prévois. Vous devez absolument garder un œil attentif sur les réseaux sociaux pour découvrir ce que nous allons faire.

L’automne promet d’être riche. ◊

thecrystalship.org

www.instagram.com/thcrstlshp/

https://www.facebook.com/thcrstlshp/?fref=ts

www.visitoostende.be

www.streetartbelgium.com

Street art / today. Les 50 plus grands noms du street art actuel

Bjørn Van Poucke & Elise Luong
Collection Arts urbains – Alternatives, Gallimard
Parution : 13-10-2016

1 comment on “Qui est vraiment Bjørn Van Poucke, fondateur du festival belge The Crystal Ship ?

  1. Rafraichissante comme interview ! C’est étonnant tout ce qui peut se passer artistiquement du côté de la Belgique. Merci à vous pour cette découverte

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