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Qui est vraiment Tilt, graffiti artiste toulousain ?

Notre interview décalée

Tilt nous raconte ses films cultes, sa passion dévorante pour le skate ou son agacement quant à l’utilisation excessif du terme street art : rencontre.

 

Les dernières créations de l’artiste Tilt veulent approcher le chaos : ses œuvres renvoient aux sentiments de possession, d’avidité et autres désirs pour nous entrainer vers une confusion générale. On y retrouve la force des couleurs et sa pratique chère du graffiti primitif. Sculptures, peintures, sérigraphies, Tilt se donne les moyens de nous montrer sa vision de la destruction.

TILT ATELIER
Studio de l’artiste, préparation de son Solo Show Don’t grow up it’s a Trap pour la Kolly Gallery. Toulouse, Juin 2017 ©Benjamin ‘Big Addict Roudet’, Kolly Gallery

Peux-tu te présenter rapidement ?

Je suis graffiti artiste, je commence à ne plus avoir envie de dire quel âge j’ai. Je vis et travaille à Toulouse. (NDLR : Tilt est né à Toulouse en 1973. Ses premiers essais datent de 1988 sur les rampes de skateboard.)

Te rappelles-tu d’un moment fort que tu as eu avec la rue ? Un souvenir très présent encore actuellement ?

Quand j’avais 16 ans et qu’on partait avec mes potes pour faire du Graffiti vandale toute la nuit dans la ville, je me souviens de l’odeur des bombes de peinture. Elle peut me plonger dans une nostalgie agréable.

Sike, Der, 2Pon, Ceet, Tilt, Tober, Toulouse 1994
Sike, Der, 2Pon, Ceet, Tilt et Tober, Toulouse 1994 ©Tilt

Un projet où tu t’es dit en le réalisant : « ça passe ou ça casse » ?

Avec mon partenaire Mist, nous avons fait une peinture gigantesque sur un toit de Brooklyn à l’époque où je vivais à New York. Alors que nous préparions notre action, nous avons été interrompu par la police en mode « Put your hands on the floor and freeze!!!! » Après leur avoir expliqué que nos intentions étaient purement photographiques et que nous préparions une scène de shooting pour le lendemain matin, ils nous ont laissé continuer. Nous avons alors réalisé et ce, jusqu’à l’aube, un énorme lettrage de 17 x 70m : MISTILT.

Le lendemain, les proprios de l’immeuble, des mafieux italiens, étaient à notre recherche. Pour éviter de finir dans les bennes du recyclage de papier dont ils avaient la responsabilité, je suis allé repeindre tout le toit à la peinture chrome.

MisTiltNYC
Le lettrage qui aurait pu mal tourner. NYC, Mistilt ©Tilt

Un sujet qui t’agace vite et pourquoi ?

Le Street art, parce que ça n’existe pas !

Essayer de tout fourrer dans une même case n’a aucun sens. C est comme vouloir dire que les skaters et les mecs qui font du roller blade lors de promenades organisées dans les villes, feraient partie de la même famille. Alors oui, ce sont des sports de glisse mais les pratiques, les motivations, les styles, la philosophie : tout les sépare !

Un sujet sur lequel tu pourrais parler des heures ?

Le skateboard. J’ai commencé à l’âge de 14 ans, je manque de temps à présent pour continuer à en faire, mais j’adore ça et ça me manque beaucoup.

Ta dernière grande déception ?

La chirurgie esthétique ratée de l’acteur américain Chuck Norris. (NDLR : Carlos Ray Norris, 77 ans, est un acteur reconnu du cinéma d’action, septuple champion du monde de karaté.)

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Tilt, Dirt, Toulouse, 2016 ©Tilt

Ta dernière grande satisfaction ?

La sortie du catalogue Epoxy, que nous avons réalisé avec Fred Nicolau à la maquette, un graphiste et dessinateur toulousain, et Benjamin Roudet à la photo. C’était en 2016, pour le festival Rose Béton de Toulouse.

( NDLR : L’exposition Epoxy a envahi les murs de la ville, des fresques géantes d’artistes renommés ont été présentées : Miss Van (FR), Honet (FR), Aryz (ESP), Ben Eine (ENG), Hendrick Beikirch (DE) ou encore Reso (FR). Des toiles ont également investi le Musée des Abattoirs de Toulouse : FUTURA (New-York), MIST (Montpellier), Craig Costello (New-York), TILT (Toulouse) et Boris Tellegen (Amsterdam). Epoxy a aussi proposé une exposition photo au sein de la galerie du Château d’Eau, avec les artistes Martha Cooper, Henry Chalfant et Sylvain Largot).

Un film qui t’as particulièrement marqué ?

Le film documentaire Style Wars m’a énormément plu, il est très instructif. (NDLR : Style Wars est un film documentaire américain sorti en 1983 sur la culture hip hop, dirigé par Tony Silver et produit en collaboration avec Henry Chalfant.)

J’ai également adoré Mulholland Drive, le film culte du réalisateur américain David Lynch (NDLR : le film est sorti en 2001, avec les actrices Naomi Watts et Laura Harring. Il obtiendra de nombreuses récompenses, dont le César du meilleur film étranger en 2002.)

Tout me plaît : sa lumière, son rythme, la musique, les personnage, les dialogues et bien sûr les différentes lectures que l’on peut en faire. J’aime l’idée qu’un film puisse avoir des interprétations proches d’une peinture abstraite.

TILT - Layers 20 - 120 x 195 cm - mixed technic on canvas - 2017
Tilt, Solo Show Don’t grow up it’s a Trap, Kolly Gallery. Layers 20, 120 x 195 cm, technique mixte sur toile, 2017 ©Benjamin ‘Big Addict Roudet’, Kolly Gallery

 

Un moment précis où tu aurais aimé te retrouver pendant quelques heures ?

Dans un dépôt de métro à New York en 1980 alors que j’aurais eu 20 ans…

Un métier que tu aurais aimé faire ?

Skater professionnel

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Studio de l’artiste, préparation de son Solo Show Don’t grow up it’s a Trap pour la Kolly Gallery. Toulouse, Juin 2017 ©Nicolas Gzeley

Quelque chose que tu trouves aberrant ?

Les cornichons du McDo.

Une personnalité que tu adores ?

Jean d’Ormesson (NDLR : Jean d’Ormesson, 92 ans, est un écrivain, journaliste, chroniqueur et philosophe français, membre de l’Académie française depuis 1973.)

Un gros gros regret ?

Savoir que, probablement, je n’arriverai pas à visiter les 193 pays du monde.

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Tilt, Solo Show Don’t grow up it’s a Trap, Kolly Gallery. Untitled, 40 x 50 cm, technique mixte sur placoplâtre, 2017 ©Benjamin ‘Big Addict Roudet’, Kolly Gallery

Une personnalité que tu aimerais rencontrer ?

Mr. Brainwash pour lui demander pourquoi il a fait ça ? ( NDLR : Introduit dans le monde de l’art urbain par son cousin Invader, Mr. Brainwash, né à Paris en 1966, est un artiste vidéaste français vivant à Los Angeles, de son vrai nom Thierry Guetta. Ses œuvres inspirées du mouvement Pop Art des années 1960 sont très controversées : pour beaucoup, l’homme serait un opportuniste.)

Ta chanson du moment ?

New York I love you, de LCD Soundsystem. (sorti en 2007, ce titre est extrait de l’album Sound Of Silver de LCD Soundsystem, projet solo du producteur américain James Murphy, cofondateur du label dance-punk DFA Records.)

Tes prochains projets ?

La réalisation d’un livre qui, j’espère, aidera à faire comprendre la nouvelle approche plus radicale de mon travail récent.

Je dois aussi faire une peinture monumentale à Marrakech et essayer de me remettre plus sérieusement au skate qui est mon premier amour et que je délaisse depuis trop longtemps. ◊

Tilt
Don’t grow up it’s a Trap
Solo Show
Kolly Gallery
Jusqu’au 7 octobre
Seefeldstrasse 56
8008 Zürich
Suisse
+41 44 252 55 66

http://www.graffitilt.com

 

2 comments on “Qui est vraiment Tilt, graffiti artiste toulousain ?

  1. camomille deglé

    Magnifique toile Layers 20 : j’adore !!
    On peut y voir plusieurs lectures, pas surprise que son auteur aime autant Mulholland Drive 🙂

  2. luciennep

    Tilt et..Jean d’Ormesson : une blague ou pas du tout ? On est tellement d’accord pour le street art, un terme qui veut tout et rien dire et qui devient vraiment pénible.

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