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Rencontre avec Yannick Boesso, Directeur d’Urban Art Fair

Yannick Boesso propose dès le 13 avril, la troisième édition de ce qui est devenu un rendez-vous incontournable dans l’art urbain : la Urban Art Fair

Yannick Boesso fait partie de ces rêveurs productifs. Sa pensée se pose quelques instants pour s’envoler plus loin, créative. Un Petit Prince au doux sourire, la naïveté en moins.

Ce niçois de 34 ans propose dès le 13 avril, la troisième édition de ce qui est devenu un rendez-vous incontournable dans l’art urbain : la Urban Art Fair au Carreau du Temple (Paris 3).

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Tu as d’abord testé la voie sportive puis musicale avant de t’intéresser à la scène urbaine ?

En effet. Je passe mon Bac économique et social puis je pratique le golf à un niveau soutenu, envisageant d’en faire mon métier. Une blessure et très probablement mon niveau, stoppent tout élan. Je retrouve mes amitiés niçoises, un peu délaissées. Elles se donnent rendez-vous pour jouer de la musique, l’occasion de tester la guitare, le milieu m’intéresse. Je rentre dans une école musique business parisienne puis à Universal Music en tant qu’assistant de chef de projet stagiaire chez Barclay. Je suis débauché par Pascal Nègre pour être son assistant, cela durera cinq ans. Il s’agit d’une grosse entreprise avec l’étendue des possibles mais aussi cette segmentation qui n’amène pas toujours une authenticité. Très formateur.

Pour différentes raisons, je me rapproche de l’art urbain. J’ai 26 ans, le milieu m’intrigue.

De là à penser en faire ton métier ?

Pas tout de suite. Un mois après être parti d’Universal Music, je monte une exposition urbaine, dans une ancienne ébénisterie, rue Chaptal (Paris 9). L’élan de la liberté me donne une vraie énergie. Je réitère cinq, six fois. Mais le lieu ne répondait pas à tous mes critères et je n’étais pas assez connecté au réseau. Je décide de déplacer mes expositions dans des hôtels, des cabinets d’avocats. En 2013, je monte Art and Partner, une structure qui relie art et entreprises, produit des expositions, manage des projets artistiques. Elle deviendra en 2015 Artvizor, que je dirige avec mes associés actuels. Parallèlement à cette création, je me dis qu’il serait intéressant de proposer une foire d’art urbain au centre de Paris. Naitra ainsi la Urban Art Fair au Carreau du temple, en 2016.

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Urban Art Fair 2016, Stand Vroom and Varossieau ©Urban Art Fair

Es-tu vite agacé par certains sujets ?

Je ne comprends pas du tout ces personnalités artistiques ne souhaitant pas appartenir à une catégorie, celle de l’art urbain, la rejetant comme s’il y avait un côté néfaste à leur carrière. Pourtant, l’identification permet une meilleure compréhension et rend finalement l’art moins élitiste et donc plus impactant.

Quels types de discussions pourraient te faire parler longtemps ?

Le débat autour de la création. A quel niveau cela commence, est-ce qu’il faut forcément passer par un outil pour créer ? C’est un thème vaste et donc évidemment intéressant.

As-tu eu une déception récemment ?

J’ai adoré amener la Urban Art Fair à New York l’année dernière. C’était une grande expérience. Nous avons essayé de faire quelque chose de très beau et j’en suis fier. Mais dans le même temps j’aurai aimé que cette aventure soit plus pérenne.

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Urban Art Fair 2017, New York ©Urban Art Fair NY

A contrario un bonheur récent ?

J’en vis un au quotidien avec cette foire d’art urbain. C’est extrêmement motivant de se lever chaque matin avec une telle pensée ! Sa création nous permet d’ouvrir d’autres perspectives. L’année dernière nous faisions un court-métrage. Cette année nous développons un musée virtuel.

As-tu été marqué par un film ?

C’est un peu un film de geek mais H2G2 : le guide du voyageur galactique m’a beaucoup plu. Il s’agit d’une métaphore de ce que sont la terre et l’univers : j’aime son côté burlesque et barré. Il y a énormément d’idées dans ce film et souvent pas si stupides que ça !

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NDLR : H2G2 : Le Guide du voyageur galactique est un film américain de science-fiction humoristique du réalisateur anglais Garth Jennings sorti en 2005 et adapté du livre en cinq volumes de l’écrivain anglais Douglas Adams (1952-2001)

Une personnalité que tu aimes ?

Le compositeur chanteur et guitariste anglais Thom Yorke, leader du groupe Radiohead. Il est un de mes liens entre la musique et l’art visuel. J’aime cet homme pour sa faculté à se remettre en question. Il a également énormément apporté à son domaine musical : expériences visuelles, sons évoluant en permanence… Il repousse toujours plus loin l’interaction avec son public. Par exemple quand le groupe sort l’album In Rainbows en 2007, une version MP3 est téléchargeable gratuitement sur leur site internet avec possibilité de faire un don. Une expérience intéressante pour l’industrie musicale : l’occasion de se rendre compte que les gens continuaient à aller sur des sites de téléchargements illégaux.

Leur campagne marketing autour de cet album était géniale aussi. Ils ont joué avec les dates, les chiffres. Il y a une vraie dimension !

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NDLR : Radiohead est un groupe de rock anglais actif depuis 1985. Il est composé de cinq musiciens : Thom Yorke (chant, guitare et piano), Jonny Greenwood (guitare, divers autres instruments, arrangements), Colin Greenwood (basse), Ed O’Brien (guitare et chœurs), et Phil Selway (batterie).

Une personnalité décédée que tu aurais aimé rencontrer ?

Cela m’aurait captivé d’observer l’écrivain juif-allemand marchand d’art et collectionneur Daniel-Henri Kahnweiler (1884-1979). Il est bouleversant. Il a défendu contre vents et marées le mouvement artistique du cubisme (NDLR : le cubisme apparaît au début du XXème siècle. Les artistes souhaitent représenter le réel de façon plus abstrait, géométrique.)

C’est aussi le premier à avoir pris des photographies des toiles pour les envoyer à des magazines, le premier à avoir mis en lien des textes de poètes et des œuvres comme avec le peintre Georges Braque (1882-1963) et le poète français Guillaume Apollinaire (1880-1918). Un homme totalement autodidacte ! Il faut absolument lire la biographie du journaliste et romancier Pierre Assouline (né en 1953), L’Homme de l’art (paru en 1989, collection Folio, Gallimard).

Qu’écoutes-tu en ce moment ?

Organeum de Girls in Hawaii. Cette chanson est si cool.

NDLR : Girls in Hawaii est un groupe rock indépendant belge, créé en 2000. Il est actuellement composé de Lionel Vancauwenberghe et Antoine Wielemans au chant et à la guitare, Brice Vancauwenberghe à la guitare électrique, Daniel Offermann à la basse, François Gustin à la guitare et aux claviers et Bryan Hayart à la batterie. Le titre Organeum sort en 2004 dans le premier album studio du groupe, From here To There. Ils seront au casino de Paris le 12 avril pour leur nouvel album Nocturne.

Une pochette d’album marquante ?

J’adore la pochette du quatrième album de Radiohead, Kid A (sortie en 2000). Elle a été réalisée par l’artiste anglais Stanley Donwood (né en 1968). Un paysage qui n’a rien de rassurant et qui évoque, selon moi, la fuite.

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Kid A, Radiohead, 2000

J’aime aussi énormément la pochette du troisième album du groupe canadien Arcade Fire, The suburb (sorti en 2010). Je l’ai fait encadrer pour la mettre chez moi. On ne sait pas si c’est un paysage pris en banlieue, il y a cette Chevrolet, ce coucher de soleil. Je trouve cela très beau.

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Arcade Fire, The Suburb,2010

NDLR : Arcade Fire est un groupe de rock canadien créé au début des années 2000. Il est composé des multi-instrumentistes Win Butler, Régine Chassagne, Richard Parry, Tim Kingsbury, William Butler, Sarah Neufeld et Jeremy Gara.

Je ne peux pas citer ces deux pochettes sans en évoquer une troisième, dessinée aussi par Stanley Donwood pour un EP de Radiohead. On y découvre un taureau qui se met la main devant les yeux. Ce dessin avait fait la une du magazine les Inrockuptibles. Une façon d’évoquer la fin du monde, c’est poignant. Les couleurs sont superbes.

Stanley Donwood

Quelles sont les prochaines étapes que tu envisages ?

Il y a évidemment la Urban Art Fair qui commence à Paris dans quelques jours. Nous l’étendrons aussi à l’étranger pour 2019. Et puis ce musée virtuel d’art urbain qui sera présenté pendant la Foire. Nous l’avons créé en collaboration avec Universal Museum of Art. C’est assez bluffant, cela permet d’appréhender l’art autrement.

Un bruit détourne l’attention insaisissable de Yannick. La pluie tombe, soudaine et bruyante, sur les toits parisiens. Le garçon se lève, il est déjà ailleurs. Une sorte de gravité émane de sa personne aux aspects aériens. Le 12 avril commence la Urban Art Fair, quatre jours pour se faire une idée du riche fourmillement interne de cet homme pensif. ◊

Urban Art Fair
Du 12 au 15 avril
Le Carreau du Temple
4, Rue Eugène Spuller
75003 Paris

urbanartfair.com

3 comments on “Rencontre avec Yannick Boesso, Directeur d’Urban Art Fair

  1. Article à la forme intéressante ! Nous serons à la Urban Art fair cette année !

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