Figure italienne de la lutte contre l’hégémonie mafieuse, Giancarlo Siani, assassiné à l’âge de 26 ans, fait l’objet de nombreuses fresques en son hommage, à Naples. Fin janvier, l’une d’elles a été honteusement dégradée.
Alors qu’à Paris, un pochoir de C215 en l’honneur de Simone Veil a été tagué de croix gammées, c’est un autre symbole de résistance qui a été bafoué, il y a quelques semaines, chez nos voisins transalpins.
Le visage de Giancarlo Siani (né à Naples en 1959), journaliste militant assassiné par la Camorra le 23 septembre 1985, a ainsi été recouvert d’un «A» anarchiste. Un acte aussi irrespectueux que scandaleux qui a révolté les habitants du district de Montesanto, secteur de Naples où avait été réalisé l’oeuvre.
C’est le street artiste napolitain Roxy in the box, de son vrai nom Rosaria Bosso, qui l’a peinte il y a un peu plus de deux ans, devant la gare de Cumana et Circumflegrea.
Le portrait de Giancarlo Siani faisait partie d’une série représentant une dizaine de personnages emblématiques de l’histoire de Naples comme la musicienne Ria Rosa, l’artiste peintre caravagiste Artemisia Gentileschi (1593-1652) ou le compositeur Alessandro Grandi (1586-1630). Cet ensemble d’effigies célèbres avait d’ailleurs été dessiné sur les pots d’arbustes entourant la place principale de Montesanto, en collaboration avec les étudiants de l’Académie des Beaux-Arts et les résidents du quartier. D’où la vive émotion générale exprimée face à cette dégradation innommable.
«Je ne pense pas que ceux qui ont barbouillé le visage de Giancarlo veuillent choquer sa mémoire. Au lieu de cela, je crains que les vandales aient simplement ignoré l’histoire. Et cela signifie que nous devons faire davantage pour que les plus jeunes sachent qui était Giancarlo et pourquoi la Camorra l’a tué (organisation mafieuse italienne clanique implantée essentiellement à Naples et en Campanie). Les jeunes doivent savoir que quelqu’un a payé de sa vie le droit d’obtenir des renseignements», a réagi le député Paolo Siani, frère du journaliste sacrifié.
Le journaliste spécialisé dans les sujets de politique locale et crime organisé, a payé de sa personne ses enquêtes sélectives. L’article qui lui vaudra sa vie portait sur les enfants employés par le système criminel local. Il faudra attendre douze ans et la collaboration de trois repentis de la Camorra pour connaître, enfin, ses criminels. NDLR
Une fresque murale de 38 mètres de long, réalisée en 2016 par « Orticanoodles » – alias les street artistes Wally et Alitaa – devant la maison de Giancarlo Siani via Romaniello, demeure à ce jour un vestige de sa mémoire intacte.

Comme pour souligner que jamais l’art ne ploie face à la barbarie. ◊
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