Le Covid-19 nous oblige à rester confiné. Profitons-en pour lire, relire des ouvrages d’art urbain !
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Street Art : un livre sans langue de bois
Street art de Simon Armstrong, Flammarion
Une jolie collection appelée « L’art en poche » pour comprendre l’art visuel à grand renfort d’illustrations et au grain de page agréable. L’auteur également artiste, agent et éditeur, Simon Armstrong, vulgarise intelligemment l’art urbain.

Son texte documenté explique les mots tout en donnant sa façon de penser, souvent directe. Comme la différence entre street art et graffiti, deux formes créatives aux frontières floues : l’un glorifie un environnement, l’autre l’agresse. Mais les deux se pratiquent « sur le vif, avec une certaine irrévérence à l’égard des institutions artistiques ».
Pour l’écrivain « le street art est un graffiti mis sur le marché ». Mais « un art qui appartient encore à la rue et non aux galeries. » On le souhaite.
A chaque fin de chapître des éléments-clés rappellent les grandes étapes de sa pensée.

Il est évidemment question de New York, la ville qui a fait du graffiti un mouvement culturel majeur, avant d’investir galeries et boîtes de nuit. Mais aussi de l’évolution de ce mouvement grâce aux réseaux sociaux : les images sont partagées plus facilement.

On aime beaucoup la partie consacrée aux ambivalences de cette pratique, renforçant la personnalité du livre. « Street art et Graffiti ont eu pour berceau le capitalisme, avec d’autres conséquences imprévues. Comme toute production culturelle, le street art ne subsiste qu’au sein du capital. Il est souvent à sa merci ou sous sa coupe…la culture est devenu un alibi pour l’ordre social. Le street art peut être une arme contestataire puissante et efficace…souvent instrumentalisée au profit du capital; de nombreux graffeurs succombent à l’attrait de l’argent et compromettent leur culture. »

Un art aux relations complexes, abordé frontalement, ce qui en fait son intérêt.
Street Art
Simon Armstrong
Collection L’art en poche
Flammarion
12 €
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Pourquoi l’art est dans la rue ? Vision engagée autour du street art
Un livre différent des autres car écrit par un artiste acteur du mouvement, Codex Urbanus. Le style est direct tout comme le vocabulaire employé.
Les premières pages annoncent la couleur, pas question ici de flatter qui que ce soit, sans pour autant chercher à blesser : annoncer des faits, simplement. Certaines personnalités se seraient emparées d’une définition globale sur ce mouvement artistique autrefois contesté, et en ferait le jeu. Classement des meilleurs artistes, dernière façade monumentale célébrée allègrement etc…Pour l’artiste, il n’est pas question ici de street art.
Pour Codex Urbanus, l’art de rue est une pratique libre qui doit le rester, sauf à en perdre sa définition.
Deux parties, la première pour en comprendre ses origines, la deuxième pour reconnaître cette pratique. L’approche est personnelle et pourra donc être discutée, mais elle a le mérite de poser les (bonnes) questions.
Pour Codex, le street art est né d’une absence d’un mouvement libre. Ne restait alors qu’un « art 2.0, dans lequel l’artiste ne fait plus rien de concret depuis quelques années mais fait réaliser par différents artisans les pièces gigantesques qui orneront les halls des collectivités territoriales. »
Le street art est un art de rue, ouvert par des précurseurs comme Ernest Pignon-Ernest ou Gérard Zlotykamien. Il est libre, martèle son auteur, et illégal.
Son deuxième chapître rappelle ces éléments, fondamentaux.
« On peut poser comme règle que, puisque l’illégalité est une condition du street art, le corollaire c’est que tout art dans une rue qui est fait légalement n’est donc pas du street art. »
Et de montrer la différence nette entre ‘ street art réel ‘ et ‘ street art légal ‘ à travers deux quartiers parisiens : Belleville et le 13 ème arrondissement. Le premier, quartier populaire du nord de la capitale, foisonne d’artistes urbains vandales, le second, de fresques taille XXL, mises en avant par son maire et la Galerie Itinerrance.
Codex s’intéresse aussi aux ‘ experts ‘ du milieu donnant leur opinion sur tel ou tel artiste ou plaçant un de ces derniers sur un projet de mur, de façade, de festival. Transparence discutable puisqu’ils sont souvent directement liés à une galerie, une association ou un magazine.

« Il y a quasiment à chaque fois une connivence logique (entre experts et projets urbains) qui vient biaiser une théorisation » Codex Urbanus
Codex n’a pas peur de citer des noms, non pas pour fustiger ou juger mais simplement rappeler des faits et peut-être aussi aiguiser les consciences.
L’artiste donne sa vision du terrain de façon presque militante, l’intérêt de son manifeste. L’art est dans la rue pour qu’on le regarde, nous, promeneurs. Il est libre, illégal et doit le rester, sinon…il n’en est pas.
Pourquoi l’art est dans la rue ?
Origines et contours d’un mouvement majeur et sauvage de l’Art Contemporain
Codex Urbanus
Critères Editions
18 €
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